H comme... Huilier



 

Notre ancêtre Jean Ballu (1780-1831) est né à Sanxay au cœur du Poitou. Son père François, y exerçait le métier de boucher.

Jean quant à lui, s'est destiné au métier d'huilier. Il a installé un petit atelier au bord de la rivière pour y mettre son pressoir, et ouvert une échoppe dans le bourg, tenue par Marie Richer son épouse, qu'il a épousée en 1805.

Ce matin, le jour se lève doucement sur les toits de tuiles rouges du petit bourg de Sanxay. Le vent frais de la vallée de la Vonne, dont le méandre enserre le village, fait frissonner les branches des noyers, et l’odeur humide des champs encore gorgés de rosée pénètre dans l’atelier.

Jean Ballu, ouvre la porte de sa petite huilerie installée au bord du cours d'eau. Le bois humide grince sous ses pas. Dans la pénombre, les meules de pierre semblent attendre le premier sac de noix ou de graines de lin. Il allume une lampe à huile - ironie du métier - et le faible halo fait danser les ombres sur les cuves et la presse de chêne.

Son vieux cheval piaffe doucement dans le manège. Jean déverse dans la trémie le premier sac de noix, achetées la veille, toutes décortiquées, à un paysan du voisinage - le fruit du travail de plusieurs veillées en famille -   et commence à actionner la meule avec l'aide de son brave cheval. Le bruit sourd et régulier résonne dans l’atelier, mêlé à l’odeur chaude des cerneaux écrasés.

Son jeune fils aîné, François, qui fait avec lui son apprentissage, surveille le feu sous le grand chaudron de cuivre, où la pâte broyée va être chauffée.

" - Doucement le feu, François, pas trop chaud ! " avertit Jean. "- Il ne faudrait pas que l’huile prenne un goût de brûlé. "

Vient ensuite le pressage. La pâte chaude est enveloppée dans des toiles épaisses, puis glissée sous la lourde vis en bois. Jean tourne lentement la manivelle, en sentant chaque résistance dans ses épaules. Une huile dorée, limpide et parfumée, s’écoule goutte à goutte dans un bassin de pierre. Même le cheval semble s’arrêter, comme fasciné par le filet lumineux.

Vers midi Jean quitte son atelier, après avoir couvert la cuve pour laisser l'huile y reposer. Il rejoint son échoppe en y transportant quelques jarres d'une huile suffisamment décantée et clarifiée pour y être vendue.

Il était temps, les premiers clients franchissent la porte : une ménagère venue chercher de l’huile de noix pour sa cuisine, l'aubergiste qui en prend un pot pour son estaminet. Jean note soigneusement chaque cruche et chaque client dans son registre.

Messire Brault, le brave curé de la paroisse, vient chercher sa commande pour fabriquer son huile sainte, nécessaire pour distribuer les extrêmes onctions ou pour administrer les baptêmes. Lui, Jean sait qu'il ne le fera pas payer, ce sera sa modeste contribution aux offrandes pour la paroisse. Et puis le bon curé Brault ne manquera pas de bénir sa boutique, ça ne peut pas nuire à son commerce...

L’huile de Jean, fruit de la patience et de l’effort, va encore pour un temps, éclairer les lampes et enrichir les cuisines du village de Sanxay.

Jean Ballu et Marie Richer auront ensemble dix enfants entre 1805 et 1829, dont sept atteindront l'âge adulte.

Nous descendons du huitième, Jacques, né en 1824, qui sera maçon (c'est l'aîné, François, l'apprenti de cette histoire, qui reprendra à son compte le commerce de l'huile).

Jean Ballu est décédé à Sanxay le 12 avril 1831, il avait 50 ans. Marie Richer lui a survécu jusqu'au 15 mai 1840, elle avait alors 54 ans.




 

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

René CHAIGNEAU, un homme d'engagement